la Mairie
de Monflanquin
 en 1817
 
 
Monsieur Bécays Lacaussade est maire depuis mai 1816 et ses premiers mois à la tête de la mairie de Monflanquin lui ont permis non seulement d’affirmer sa personnalité mais également son attachement à une action de type paternaliste pour défendre ses administrés. (1)
 
L’année 1817, de plein exercice, va lui permettre de mettre en application l’ensemble des règles de fonctionnement d’un conseil municipal, dans le cadre prescrit par la loi. (2)
 
Tout d’abord, le maire et ses deux adjoints sont choisis, en vertu de la loi de Thermidor an X, parmi les membres du conseil, par le chef du gouvernement puisque la commune de Monflanquin a plus de 5000 habitants. La durée de leurs fonctions non prévues en l’an VIII a été fixée en l’an X à cinq ans, elles peuvent être renouvelées.. .
 
Une fois en place, selon l’article 15 de la loi du 28 pluviôse an VIII [février 1800], ce conseil « délibère » sur les besoins particuliers et locaux de la municipalité. Délibérer ne veut pas dire à cette époque, décider, mais essentiellement examiner, discuter, confronter des points de vue pour dégager une volonté commune. Ainsi l’acte du conseil municipal paraît dépasser un simple avis ou voeu pour devenir une proposition.
Le même article 15 porte que le conseil municipal réglera, c’est à dire décidera, le partage des affouages, pâtures, récoltes et fruits communs.., la répartition des travaux nécessaires à l’entretien et aux réparations des propriétés qui sont à la charge des habitants. C’est à dire que le conseil exerce librement la gestion courante des biens communaux.
 
Dispositions qui tempèrent quelque peu les pleins pouvoirs qui semblent, selon la loi, appartenir au maire. En effet la loi du 28 pluviose  an VIII, en application depuis le consulat, énonce en son article 3 que « le préfet sera chargé seul de l’exécution ». Or ce qui est vrai pour le préfet, l’est aussi , bien que la loi  n’en fasse pas expressément mention, pour le sous-préfet et pour le maire.
 
Mois après mois, le conseil municipal et son maire vont s’attacher à résoudre les problèmes qui sont de leur responsabilité et donner ainsi un aperçu de l’étendue de la compétence qui leur est reconnue.
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Premier
Trimestre
 de
1817 
 
 
 
Début janvier le cahier évoque, à propos du chemin vicinal de Monflanquin à Villeneuve, la circulaire qui octroie 25.000 Frcs « destinés à former des ateliers de charité pour la réparation des chemins ». Demande est faite de bénéficier de cette subvention (3).
           
Quelques jours plus tard il est question des difficultés rencontrées par le préposé à l’octroi de la ville, insulté dans ses fonctions. La municipalité réclame du juge de paix   des sanctions plus sévères car « la place n’est pas tenable si on ne met pas un frein à de pareils délits qui rendent inutile le rétablissement de l’octroi ».. Autre doléance soumise au sous préfet : les cafetiers et cabaretiers, ouverts la nuit, récusent le règlement municipal, d’autant plus que le juge de paix se déclare incompétent en la matière ; en sorte, écrit le maire, «  que je me vois dans l’alternative de ne pas voir mes avis respectés ou de ne point maintenir la police ». Ce qui laisse supposer certaines tensions sur le plan économique et social.
           
Le 21 janvier, cependant, « L’anniversaire de la mort de l’infortuné Louis XVI a été célébré. Un service solennel a eu lieu tant à l’église qu’au temple des réformés, en expiation des outrages faits à sa Majesté. « Les corps constitués, les membres du conseil municipal, les chevaliers de St Louis et de la Légion d’Honneur, les militaires retraités, les gardes nationales, les fonctionnaires publics, de tous cultes, accompagnés de la gendarmerie, réunis sur notre invitation à l’hôtel de la mairie, où le cortège s’est formé en deux branches dont l’une s’est rendue à l’église et l’autre au temple ... Pendant cette cérémonie les magasins et les boutiques étaient fermés et tous les travaux suspendus ». Description qui a pour intérêt de conforter la conclusion des rapports selon lesquels « l’esprit public s’améliore de jour en jour.. et l’esprit révolutionnaire se calme ».
 
           
En février l’acquittement des contributions de l’année écoulée permet au maire d’insister « sur la célérité mise pour la rentrée de ces impositions, dans une année où les différents fléaux ont accablé cette commune »... Là encore le maire ne manque pas l’occasion de souligner les bonnes dispositions de la population locale à l’égard du pouvoir en place.

Le maire se veut également rassurant sur l’existence des armes de guerre à propos desquelles le préfet a lancé une enquête. « Monsieur le maire, que j’ai remplacé, a laissé à ma charge, sans noms des détenteurs, onze fusils de guerre, vingt fusils de chasse, un petit sabre et six mauvaises épées. .. Si vous pouviez laisser à la disposition de la commune de Monflanquin les onze fusils pour armer les gardes nationaux lors de la formation de la garde nationale ou d’un détachement de volontaires si le cas exigeait d’en requérir pour maintenir la tranquillité publique ». .. De plus « depuis la publication de la loi, personne ne s’est présenté pour déposer de telles armes ».

Les mercuriales se font maintenant régulières : « M. le sous-préfet, ci-joint vous trouverez la mercuriale de la dernière quinzaine du mois de février » ... Car il est indispensable de suivre de près les conditions économiques dont les effets sociaux sont redoutés.
 
De même se multiplient les informations concernant l’hospice et le bureau de bienfaisance,  « M. de St Caprais, membre sortant, ne veut point être réélu et que nous aimerions bien pouvoir conserver ». La terminologie « ateliers de charité », « bureau de bienfaisance » révèlent l’esprit dans lequel se développe cette action  sociale (3).
           
La garde nationale n’est pas absente des préoccupations de la municipalité dont le maire souligne « je n’ai pas de garde nationale organisée dans ma commune... les gardes nationaux à cheval qui y sont domiciliés méritent des décorations en témoignage de leur dévouement à la personne et à la légitimité du trône. Parmi lesquels : de Védrines, de Vernejoul, de Persy, Vistorte, Capdeville ». Tous des représentants de familles propriétaires terriennes, installées de longue date à Monflanquin.
 
En mars la préfecture est destinataire, à propos de la Légion d’Honneur, d’un état des légionnaires résidant dans la commune.. Cette distinction instituée par l’Empereur est maintenue certes mais soumise à inventaire de la part d’une mairie dont l’un des  rôles primordiaux est d’être un observatoire avancé de la préfecture, représentante du pouvoir en place.
           
Dans un tout autre registre, la mairie se doit également d’établir des états sur les militaires installés dans la commune. « Aucun militaire autrichien en congé ou pensionné » répond le maire. Il en va de même pour «  les déserteurs de la marine qui voudraient profiter de l’amnistie accordée par l’ordonnance royale... »
 
En fait, ce sont surtout les chemins vicinaux qui retiennent l’attention des responsables de la mairie et plus particulièrement le chemin Villeneuve-Monflanquin pour lequel M. de Lacaussade écrit au préfet : « il m’est parvenu qu’une pétition devait vous être présentée en réclamation de la réparation du chemin de Monflanquin à Villeneuve... Je suis bien aise Monsieur de vous prévenir contre l’insinuation défavorable que l’on pourrait glisser contre la réparation de ce chemin, qui quoique on puisse vous en dire est le plus mauvais de ma commune et dont le projet de rétablissement de viabilité réunit l’assentiment de tous les gens sensés de Monflanquin... dont le conseil municipal a de nouveau à l’unanimité manifesté le voeu... Je vous prie de bien vouloir le rendre exécutoire aussitôt qu’il vous sera possible. Je l’attends pour pouvoir faire travailler les pauvres. »
 
 Second
 Trimestre
 de
 1817
 
 
 
 
Au mois d’avril les affaires médicales prennent un certain relief dans les préoccupations locales. C’est d’abord le recensement des médecins, chirurgiens, pharmaciens, sages-femmes. C’est surtout l’assurance donnée au sous-préfet que « nul enfant de Cambes n’est atteint de la petite vérole » et qu’il y  erreur sur le nom du lieu concerné.
 
Le charivari de Boulède ne passe pas inaperçu en un temps où l’on s’interroge sur l’état de l’opinion publique et de son attachement à la monarchie de retour. Des complots libéraux entre 1816 et 1817, sur le plan national, sont là pour poser le problème. Dans la commune de Monflanquin, depuis près de deux mois, la jeunesse de la contrée se réunit la nuit pour faire du bruit et la municipalité ne peut y mettre un terme. Le dimanche 13 Avril, le maire envoie la gendarmerie à Boulède pour « dissiper les attroupements » et de cette intervention les gendarmes  rapportent à la mairie un drapeau blanc surmonté de l’effigie d’un aigle et d’une bande d’indienne à fond blanc avec des mouches rouges et brunes. Le maire atténue autant qu’il le peut l’incident : « Je suis loin de croire que cette jeunesse ait eu l’intention  d’arborer des figures réprouvées par le gouvernement. » Cependant il n’est pas exclu à ses yeux qu’il y ait manoeuvre car « à cette époque on parlait en divers endroits d’enrôlements pour Napoléon ». Or les coupables sont connus et « il serait nécessaire de quelques petites punitions » pour empêcher les futurs charivaris « dont les auteurs n’attendent que l’essor de cette affaire pour se fixer sur la conduite qu’ils auront à tenir »... « une légère correction peut quelquefois prévenir de grands délits ».
 
L’affaire Piarrou Pierre, ex caporal du 2° régiment des sapeurs, permet de prendre contact avec une des pratiques de surveillance des personnes à l’époque :  le passeport nécessaire pour se déplacer dans le pays .. « Piarrou ne peut avoir reçu un mandat à Agen le 19 mars dernier, puisqu’à compter du 9 juillet 1816 jusqu’au 2 Mai inclusivement il a voyagé pour gagner sa vie en faisant le métier de marchand colporteur muni d’un passeport que je lui ai délivré.... le 19 Mars il était loin de Agen, c’est  ce qui est facile d’observer par les visas portés sur son passeport. »
 
Les boulangers sont sur la sellette en raison d’une situation économique préoccupante. « Les circonstances critiques où nous nous sommes trouvés l’an dernier et dont nous sommes encore menacés par la hausse subite du prix des grains, la crainte que nous avons éprouvé que plusieurs boulangers ne pussent, par manque de moyens ou par imprévoyance, suffire à l’approvisionnement journalier des habitants.. tous ces motifs nous font le devoir de prendre des mesures qui ont été déjà prises par le gouvernement en faveur de plusieurs villes du Royaume. » Ce dispositif est suivi d’effet sur le terrain par le maire qui engage une procédure d’interdiction temporaire à l’encontre du contrevenant Petit Jean. Les grandes émotions populaires, les marchés attaqués et les boulangeries pillées, çà et là en France de novembre 1816 à janvier 1817, sont trop proches dans le temps pour ne pas en tenir compte
Le prix du pain est en même temps suivi de près : I° quinzaine d’Avril le prix de la deuxième qualité de pain est de 47 centimes, dans la 2° quinzaine de 46 centimes, dans la 1° quinzaine de Mai le prix est monté à 49 centimes. D’autant plus que l’augmentation de son prix entraîne un renchérissement des autres denrées alimentaires.
 
Au mois de mai, la municipalité établit le budget de la commune, dont les résultats sont facilement comparables d’une année à l’autre  puisque le Franc est à valeur constante :
 
 Comptes de 1816
Recettes
3.810 Frcs
 
Dépenses
3.810 Frcs
 
  Prévisions de 1818
Recettes
4.804 Frcs
 
Dépenses
4.804 Frcs
 
Les postes de dépenses, pour 1818, donnent une idée des charges de la municipalité : greffier 700, garde champêtre 600, desservants des églises 340, commissaire de police 250, receveur municipal 100, sage femme 100 ... réparations des églises et du temple 500, frais de bureau 200, six réverbères pour les cornières de la place 200, logement du pasteur 190, puits et fontaines 185, logement du curé 150, pavés 100, promenades 100, fêtes publiques 100, registre de l’état civil 70, horloges 30...
 
La comparaison entre le bilan 1816 et le budget prévisionnel 1818 indique une augmentation sensible des Recettes et Dépenses ; il serait intéressant, dans une analyse plus poussée en matière budgétaire, de trouver les postes concernés (4).
  
Troisième
Trimestre
de
1817
 
 
 
 
 
En juillet, des lettres sont expédiées au procureur du roi et au préfet, « relatives à une très mauvaise qualité du pain ». Pain obtenu à partir d’un blé de bonne qualité.... Tout porte à croire que le bled a été altéré ; mais comment savoir par qui ? .. Je vous transmets une bouteille de cette même farine et un échantillon du pain concerné»... La relation avec les boulangers est d’ailleurs tendue au point que deux gendarmes de service le jour de marché se font insulter par l’un des boulangers... Le maire demande donc l‘autorisation au sous préfet de convoquer le conseil municipal « afin que l’administration et les boulangers soient fixés irrévocablement dans les moyens à établir pour maintenir les subsistances dans cette commune ».
D’ ailleurs, le maire s’inquiète des mauvaises récoltes... « En raison des mauvaises récoltes de l’an dernier », il envoie une circulaire aux propriétaires aisés pour verser du bled dans un magasin afin d’assurer l’approvisionnement du marché. Il espère ainsi pallier aux variations des prix du grain... Quelques semaines plus tard il envoie au sous préfet « le tableau approximatif de la récolte de 1817.Vous remarquerez qu ‘elle n’a pas été bien abondante et que nous éprouvons un déficit pour la consommation, notamment en bled froment. Cette situation est caractéristique de la crise frumentaire que traverse toute la France en 1816-1817.
 
A cette occasion, il est intéressant de noter la tutelle qu’exerce la préfecture y compris sur les convocations du conseil municipal.. Tutelle des structures locales, surveillance des individus sous toutes ses formes. Le 25Juillet le maire relate au sous préfet : « Mr Larrieu officier en non activité fait un commerce qui le met dans le cas d’être souvent absent. Il m’a fait prier de vouloir bien le faire pointer présent sur la feuille de revue. J’ai bien voulu pour cette fois-ci seulement me prêter à son désir... Comme je ne pourrai y consentir à l’avenir malgré le désir que j’aurais d’obliger un officier, je vous serai obligé de me fixer sur la conduite que j’aurai à tenir à son égard ».
 
En écho à la loi Laîné de février 1817, qui accordait le droit de vote à tous les contribuables âgés de 30 ans et payant 300 Frcs d’impôts, « le sieur Bruyère fils, marchand de fer, domicilié à Monflanquin, âgé de 45 ans devrait être sur les registres des électeurs ... constatant qu’il paye 445 Frcs de contributions dans ce département... Je suis surpris, après avoir donné toute la publicité possible, qu’il ne se soit pas présenté d’autres personnes ayant les conditions requises pour être électeur à l’effet d’être portées sur les registres... ». Pour le moins l’enthousiasme n’est pas au rendez vous.
 
En août la fête de l’assomption du 15 août est préparée par une circulaire : « La procession pour l’accomplissement du voeu de Louis XIII, renouvelé par Louis XVIII, devant avoir lieu vendredi prochain après vêpres, j’ai l’honneur de vous inviter de vous rendre à l’hôtel de ville de la mairie pour, réuni au cortège, aller assister à cette sainte cérémonie, et demander par nos prières à Dieu qu’il lui plaise d’exaucer les voeux de notre auguste monarque et qui sont ceux de toute la France ».
 
La fête de la St Louis, le 25 août,  est également l’objet d’une attention toute particulière. Le 21 et 22 août des convocations sont adressées aux membres du conseil, aux chevaliers de St Louis, de la légion d’Honneur, aux officiers demi solde et retraités « pour se rendre à l’église remercier la providence de l’avoir rendu à nos voeux avec son auguste famille et implorer le tout puissant pour qu’il daigne répandre ses bénédictions sur ces dignes et légitimes héritiers du trône de St Louis »....
 
Cette fête « de notre bon roi » a été, selon le maire, « célébrée avec beaucoup de solennité... Elle a été annoncée par le son des cloches tant la veille que le lendemain dans la matinée. Un drapeau blanc tout neuf a été placé dès le lever du soleil au point le plus élevé de la ville ; bientôt après il en flottait sur les maisons et les édifices  publics. A deux heures ]les autorités] et les principaux notables des deux cultes se sont réunis à l’hôtel de ville de la mairie d’où le cortège divisé en deux branches s’est rendu, l’une accompagnée de la gendarmerie à l’église et l’autre au temple pour implorer les grâces et bénédictions du tout puissant sur le légitime potentat qui nous gouverne et sur son auguste famille. »  Les pieux chants entonnés par M. le curé « ont été suivis par les cris de Vive le Roi maintes fois répétés par tout l’auditoire. Après la cérémonie des deux cultes chaque branche est rentrée dans le même ordre à l’hôtel de ville de la mairie. Ensuite des bals publics ont commencé pour durer tard dans la nuit. Le bon ordre a été religieusement maintenu, la tranquillité n’a pas été interrompu un seul instant. ». Cette insistance à souligner le bon ordre amène à penser que personne n’est sûr des réactions populaires en cet été 1817.
 
A peine remplis les devoirs à l’égard de ce rituel monarchique, la municipalité retourne à ses préoccupations : le procès verbal d’installation des conseillers municipaux ... Les conseillers installés à Monflanquin, en ce mois d’août, sont au nombre de dix, la loi prévoyant le renouvellement par moitié ; ils sont nommés par le préfet sur ordonnance du roi et ils sont choisis sur une liste de confiance. Ils sont en outre invités à prêter serment d’allégeance au roi avant de prendre place au conseil municipal... Cette même année Mr Delbourg est nommé pour une durée de dix ans juge de paix du   canton (5) Par le caractère conciliateur de son office, le juge de paix est un personnage intéressant des structures locales . Cependant, même conciliateur, il prolonge en raison de  sa nomination  le personnel administratif local choisi pour ses idées politiques.
 
 Au  mois de Septembre une séance extraordinaire, en date du 7, se penche sur le dossier de l’école primaire. « Vu les articles 14 et 17 de l’ordonnance royale du 29 février 1816 relatifs à l’instruction primaire, vu la circulaire de Mr le préfet. Considérant qu’une administration sage et éclairée ne peut que sentir le grand avantage pour les moeurs qui résultera de l’instruction primaire... »
 
« Article I : il sera donné à l’instituteur pour apprendre à lire par les parents 1frc50 ; pour apprendre à lire et écrire 2 francs ; pour apprendre à lire, écrire et compter 3 francs...                   
 
Art. II : « Le nombre de vingt enfants sera admis gratuitement à l’école primaire »...              
 
Art. III : « Une  somme de 180 frcs  par an est fixée pour être répartie entre les  trois instituteurs, à raison de 60 frcs chacun. Cette somme servira d’indemnité de logement et aussi pour l’enseignement donné aux enfants indigents.... Il sera dressé un tableau des écoles existant dans cette commune, des instituteurs brevetés, du nombre d’élèves payants et indigents.. »
 
Art. IV : « Le nombre des instituteurs dans cette commune est restreint à trois. Ils seront tenus d’habiter le chef-lieu »
 
Double de cette délibération est envoyé au sous-préfet pour avis avant de faire suivre auprès du préfet pour décision. Dans le même respect de la procédure en usage, une correspondance aux curés des paroisses de la commune a précédé de quelques jours ce règlement, associant pleinement le clergé à l’encadrement de l’enseignement : « Il m’importe de connaître le nom de tous les pères de familles de la classe indigente... et qui désireraient donner à leurs enfants l’instruction primaire ».
 
Quatrième
Trimestre
de
1817
 
 
 
 
 
Au mois d’octobre, la mémoire de Marie Antoinette est commémorée en un prolongent logique des manifestations en l’honneur  de  la  mort  de  Louis XVI  en  janvier  puis  de  la  fête de St Louis en août : « l’anniversaire de la mort tragique de Marie Antoinette d’Autriche reine de France devant se célébrer jeudi prochain à dix heures du matin dans l’église paroissiale de cette ville. J’ai l’honneur de vous inviter à vous réunir aux autorités constituées à l’hôtel de ville de la mairie le dit jour vers les neuf heures du matin pour de là aller, en corps, assister à cette lugubre cérémonie faite pour renouveler de douloureux souvenirs et attendrir tous les coeurs ».
 
Derrière ces moments de mémoire officielle présentés comme spontanés et unanimistes, les états réclamés à la municipalité pour assurer la surveillance du pays continuent pourtant d’être régulièrement dressés.
 
 
 
 
 
 
 
En décembre, ces états en question incluent le suivi de l’une des marchandises sans conteste la plus surveillée : la poudre à feu.... « Le sieur Bouy débitant de poudre » doit régulièrement donner le poids exact de la quantité qu’il détient, avec ses achats et ses ventes. « Suivant sa promesse de remplir les obligations que lui impose sa qualité de débitant de poudre » il doit avoir « soin de tenir registre de tout ce qu’il débitera ». Précisions qui permettent aux responsables locaux de suivre l’évolution de son stock  qui, dans l’année, tourne autour de six kilos de poudre.
 
L’occupation étrangère se glisse subrepticement  dans la vie monflanquinoise par les réactions qu’engendrent les  cent millions de guerre : « J’ai reçu par le courrier du 12 de ce mois la circulaire de Mr le préfet avec toutes les pièces relatives au remboursement de l’emprunt des cent millions. Je vais m’occuper du travail qu’il  me  prescrit et aussitôt qu’il sera terminé je m’empresserai de vous en donner connaissance ».... Quelques jours plus tard l’information prouve que tout n’est pas si simple : « J’ai l’honneur de vous prévenir que plusieurs individus de cette commune appelés par le percepteur pour recevoir ce qui leur revient de l’emprunt de cent millions, se sont refusés à recevoir, prétendant vouloir recevoir une somme équivalente à celle qu’ils ont prêté, ajoutant que personne n’avait le droit de vendre leurs créances sans leur participation ». Cent millions, montant de l’emprunt extraordinaire sur les  riches que Louis XVIII  avait prélevé l’année précédente pour payer les subsistances des troupes étrangères installées sur le territoire français.
 
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L’année 1817 offre un large tableau des secteurs d’intervention de la mairie :
 
- la gestion des biens communaux (chemins vicinaux, églises, pavés, éclairage, eau...)
- l’établissement du budget de la commune avec contrôle des recettes (octrois...)
                                                           et des dépenses (bureau de bienfaisance...)
- la prise en compte d’emplois municipaux (greffiers, gardes champêtres...)
- le suivi des conditions de vie locale (mercuriales, bienfaisance, enseignement, santé...)
- l’application de la réglementation (passeports individuels, vente de la poudre...)
- l’organisation des fêtes commémoratives  (Louis XVI, Marie Antoinette...)
 
Cet éventail de compétences restera le socle des attributions des municipalités dans leur évolution au cours du XIX° siècle, et au-delà .... La loi municipale de juillet 1837 confirmera la notion de la personnalité civile de la commune, qui est propriétaire de biens, qui peut être gratifiée de dons et de legs, qui peut réaliser des actes juridiques.... La loi municipale de 1867 étendra en partie les attributions du conseil municipal.... L’innovation la plus spectaculaire appartiendra à la loi de mars 1890 qui consacrera une forme nouvelle, une possibilité d’élargissement des actions entreprises : les syndicats de communes.
 
 
                                                                                  Odo  Georges
                                                              "Sous les Arcades"
                                                                 2000
 
 
 ·      Bibliographie :
 
            1 - Odo georges : « La mairie de Monflanquin en 1816 » SLA   1998  n°388   
            2 - Sautel gérard : « Histoire des institutions publiques » Précis Dalloz 1990
            3 - Registre de Correspondance Générale, commune de Monflanquin ». 1816-1935
            4 - Registre des Délibérations du  conseil municipal de la commune de Monflanquin
            5 - Odo georges : « Le juge de paix au temps de la révolution » Revue Agenais 1997